La saveur d'un aliment est-elle protégée par le droit d'auteur ?

La Cour de justice de l'Union européenne considère que le goût contient un élément subjectif qui l'exclut de la protection du droit d'auteur.

28 NOV. 2018 · Lecture : min.
La saveur d'un aliment est-elle protégée par le droit d'auteur ?

L'identification précise et concrète de chaque aliment est nécessaire pour pouvoir établir une évaluation objective.

Le cas du fromage à tartiner

L'arrêt de la CJUE du 13 novembre 2018 a rejeté la demande d’une entreprise de qualifier comme œuvre le goût d'un de ses aliments, en l'occurrence un fromage à tartiner créé par une entreprise néerlandaise. La société a acquis les droits de propriété intellectuelle sur ce produit par cession de son auteur. Selon elle, une chaîne de supermarchés et le fabricant d'un produit similaire, avaient reproduit le goût du fromage, portant ainsi atteinte à son droit d'auteur.

Le fabricant du supermarché soutient dans sa défense que la protection des arômes n'est pas conforme au régime du droit d'auteur, qui ne comprend que les créations visuelles et auditives. D'autre part, il estime que l'instabilité d'un aliment et la nature subjective de la perception gustative empêchent de considérer le goût d'un aliment comme une œuvre protégée par le droit d'auteur. En outre, les droits exclusifs de l'auteur d'une œuvre de propriété intellectuelle et les limitations auxquelles ces droits sont soumis sont, en pratique, inapplicables aux arômes.

Conformément à la directive 2001/29 sur le droit d'auteur, pour qu'un objet soit qualifié d'oeuvre, deux conditions sont requises :

  • Son originalité, dans le sens l’on retrouve la création intellectuelle de son auteur ;
  • L’expression de l'objet qui l'identifie avec suffisamment de précision et d'objectivité, même lorsque cette expression n'est pas nécessairement permanente.

La décision de la Cour de Justice de l’UE

En réponse à ces exigences, la CJUE estime qu'il n'y a aucune possibilité d'identification précise et objective de la saveur d'un aliment. Comme le note la Cour, à la différence d'une œuvre littéraire, picturale, cinématographique ou musicale, qui est une expression précise et objective, l'identification de la saveur d'un aliment est basée sur les sensations essentielles et les expériences gustatives, subjectives et variables. Il est donc très difficile d’établir une évaluation exacte du goût.

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Les règlements applicables

On retrouve trois normes qui permettent d’établir le cadre juridique sur le respect des droits d’auteur et de la propriété intellectuelle à respecter :

  • La directive 2001/29 / CE, sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur.
  • L’accord OMCE sur les aspects des droits de propriété intellectuelle liés au commerce.
  • Le traité de l’OMPI, adopté à Genève en 1996.

La notion d’œuvre

Voilà une notion uniforme et autonome du droit de l’Union car elle marque la base dans le droit de l’Union Européenne. C’est pourquoi il est important de toujours rechercher une interprétation autonome et uniforme. Le terme « œuvre » dans le cadre juridique de l’Union Européenne rappelle l’importance du sens et de la portée de cette dernière. C’est la Cour qui décide ensuite les termes d’application. Ainsi, vous l’avez compris, la Convention repose sur l’interprétation et la formulation d’une œuvre. Toutefois, rappelons que lorsqu’il y a doute, le droit peut être amené à être modifié comme par exemple cela a été le cas dans le domaine numérique.

En conclusion, la question reste fondamentale pour l’ensemble de l’industrie agro-alimentaire pour pouvoir définir peu à peu le cadre exact de la protection.    

Photos : Unsplash

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